L’art brut au musée

 

 

                                                                                daniel et madeleine lommel

A l’aube de l’ouverture du musée de Villeneuve, la question « faut-il faire entrer l’art brut au musée » reste toujours aussi embarrassante !


Dans l’obligation d’informer au mieux le public sur la teneur de la richesse de l’ensemble des collections, rassemblées pour la première fois dans l’histoire de l’art et muséale sous le même toit, il est important d’en considérer l’éclectisme.


L’art moderne et contemporain sont des dénominations chronologiquement culturelles de l’histoire des beaux-arts ; l’art brut est situé hors de cette chronologie, mais il se doit cependant de figurer dans un musée auprès de toute autre création parce qu’il est un art dans le sens grec de technè, d’activité productive d’une façon convenant au créateur et au résultat physique. Si l’art brut se situe hors des valeurs établies par l’histoire de l’art, il n’est pas moins l’élan originel humain au sein d’un monde mécanique et intellectuel, le besoin de manifester plastiquement les sentiments les plus puissants, la faim de symboles pour fixer et approfondir le vécu personnel.


Dans un même musée, l’art brut à côté des «art moderne et contemporain» nous rappelle une incommode généalogie oubliée… à l’époque de crise de la modernité, les esprits ont dû rechercher une issue en changeant de perspective, il s’est alors imposé le besoin de regarder d’une autre manière (« retour aux sources»).


De cette nécessité interne ainsi qu’externe sont nées des explorations diverses comme l’ethnologie, mais la plus chère et la plus profonde, car elle concerne l’homme dans sa globalité, est celle de l’art brut qui aura marqué une page dans l’histoire de la création.


Nombre de textes ont été écrits sur ce dernier, les analyses les plus fines, les plus pertinentes qui devraient faire qu’aucun malentendu ne puisse plus jamais être formulé à son propos ; ainsi devons-nous ne jamais oublier qu’il s‘agit de la reconquête d’une énergie intime, de sa réorganisation.

Acte issu d’une expérience personnelle : celle que “l’homme du commun” acquiert au travers d’un métier, d’une pratique, voire d’une épreuve et qui annule toute tentative de comparaison ou d’assimilation avec ce qui tient d’une recherche artistique esthétique.


 Il s’agit ici d’histoire humaine, de ses aléas, de ses vicissitudes, de la fatalité, et non, bien entendu, d’histoire de l’art, avec ses mouvements, ses lois, ses exigences, ses revendications. Il s’agit aussi, et sans doute est-ce en cela que nous ne pouvons y être indifférent, d’un peu de soi !


Successivement mis à jour par les psychiatres, les artistes, les intellectuels, les œuvres «art brut» demandent grande attention. Face à ce déferlement de singularités, d’individualités, il est difficile d’évaluer avec justesse la place qu’elles doivent occuper au sein d’un musée d’autant que pour la première fois l’audace est prise de réunir le tout !


Et puisque pour la première fois un musée tente ce rassemblement il ne faut qu’aucun doute ne subsiste à ce propos, mais que ce soit pour tout un chacun une leçon de vérité d’acquis et de plaisir.





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